Danses cubaines

Durant tout le 20ème siècle, Cuba a été la source d'une multitude de créations musicales et artistiques qui se sont exportées à travers le monde. Ceci est du tout à la fois à sa position de carrefour des caraïbes et du continent américain mais aussi à son histoire politique et sociale.

Aujourd'hui, quand on associe "Cuba" et "Danse", on pense à "Salsa". Ce terme est assez difficile à définir et est sujet à controverse depuis de nombreuses années. Il englobe très souvent beaucoup de genres musicaux et de danses. Tour d'horizon sur les origines de la Salsa :

 


 

La Rumba

Durant toute la traite négrière à Cuba, les esclaves africains qui se retrouvent déracinés et parqués dans leurs baraquements cherchent à perpétuer leurs chants rituels durant les rares moments libres des journées de travail. Ceux-ci sont accompagnés de tambours et certains esquissent quelques pas de danse improvisés. Les influences des diverses ethnies africaines représentées se mélangent pour produire, vers le milieu du 19ème siècle, une musique et une danse profane purement cubaine : la Rumba.

Suite à l’abolition de l’esclavage à la toute fin du 19ème siècle, nombre d’esclaves affranchis quittent les champs pour se diriger vers les petites et grandes villes en quête d’un emploi mais sont repoussés vers les quartiers les plus populaires ou vers des terrains bidonville. L’accès à l’emploi étant difficile, pour occuper ces longues journées, on prend l’habitude de se réunir pour danser et chanter dans des fêtes de Rumba dans les solares (cours intérieures des grands immeubles collectifs).

Les textes de la Rumba parlent du quotidien : amour, amitié, trahison, difficultés quotidiennes, mort, événements particuliers… ou lancent un défi aux autres musiciens ou danseurs. Jusqu'aux années 60, la Rumba est considérée comme vulgaire car à connotation sexuelle. Elle est proscrite dans les lieux publics et les cabarets et continue d'être jouée dans les solares. Il faudra attendre la Révolution cubaine pour que le gouvernement professionnalise les musiciens et les danseurs, perdant en partie l'esprit spontané et populaire des formations de Rumba.

On peut distinguer trois formes de Rumba : Columbia, Yambú et Guaguancó

Columbia

Yambú

Guaguancó


 

Le Changüi

Le changüí est un genre musical et une danse nés vers 1860 dans la partie orientale de Cuba (Guantanamo).

C'est la musique des Cumbanchas (fêtes paysannes) durant lesquelles les familles se réunissent et vont de maisons en maisons. Les motifs de ces fêtes peuvent être un mariage, un anniversaire ou tout simplement l'envie de passer un bon moment et de le partager avec la famille ou des amis.

C'est également une danse de couple constituée principalement de déplacements. Il n'est pas question de faire des figures. En général, les passes utilisées se résument à quelques tours du danseur et de la danseuse. Les danseurs doivent adopter une posture élégante et les pas doivent être de faible amplitude. Ils effectuent également une légère flexion des jambes et remontent très rapidement, ce qui donne l'impression que la danse est un peu sautée et qui accentue le déhanché du couple.


 

Le Danzón

Le Danzón est un genre musical et une danse qui tient ses origines de la Contredanse française (ou Country Dance anglaise) qui se pratiquait dans les cours royales de France et d'Angleterre.

L'occupation de l'île par les colons français, britanniques et espagnols entre le 16ème et 19ème siècles ont contribué à développer cette danse, qui, au contact des rythmes caribéens et africains va se transformer en Danza vers 1830 puis en Danzón vers 1870.

Elle se danse en position fermée de manière très rapprochée. Les mouvements sont exécutés avec élégance. Les danseurs se déplacent peu et leurs pas, glissés sur le sol, ont une amplitude restreinte. Les genoux sont en constant travail pour donner au bassin un subtil mouvement.

Avant de devenir la danse nationale cubaine au début du 20ème siècle, le Danzón fut d'abord considéré comme scandaleux. Il fut à ses débuts qualifié de danse aux mouvements de hanches "obscènes" effectuée par de jeunes couples, parfois de couleurs différentes, dont les corps, en position fermée, se touchaient.


 

Le Son

A la fin du 19ème siècle, venant de la région montagneuse du Sud de l’Oriente, un musicien guantanamero du nom de Nené Manfugás arrive pour les fêtes du Carnaval de Santiago. Ce musicien apporte avec lui un son nouveau dérivé du Changüi : le Son. Une nouvelle danse va alors émerger en s'inspirant de deux autres danses populaires : le Changüi et le Danzón. Elle va ensuite petit à petit se répandre dans toute l'île jusqu'à la Havane.

Dans les années 20 et 30, le Son va devenir la danse la plus populaire. Symbole de l’élégance, c'est une danse de caractère et d'interprétation qui se compose de beaucoup de déplacements, mais aussi parfois de mouvements visuels et acrobatiques.


 

La Salsa

Au début du 20ème siècle, les musiciens cubains et portoricains qui s'expatrient aux États-Unis (et principalement à New-York) vont amener avec eux leurs répertoires musicaux : le Son mais aussi d'autres musiques cubaines comme le Guaracha, le Chachacha, le Bolero, ou des musiques portoricaines comme la Bomba ou la Plena.

A partir des années 30, les Etats-Unis s'emballent pour la musique cubaine suscitant dans leur esprit des fantasmes tropicaux. Véritable carrefour multiculturel, New-York permet de réunir des musiciens "latinos" qui vont mélanger et fusionner leur rythmes traditionnels dont l'influence cubaine est majoritairement perceptible. Ainsi, la "Big Apple" verra apparaître tour à tour plusieurs modes, plus ou moins éphémères, comme le Boogaloo, le Pachanga, le Latin-Jazz, le Mambo et enfin la Salsa.

A partir des années 60, la rupture diplomatique entre Cuba et les Etats-Unis met un frein à l'influence musicale de l'île. La Salsa émerge à cette période comme le résultat d'un mélange de tous ces rythmes, majoritairement influencée par le Mambo et commence à devenir très populaire. La mode s'essouffle à la fin des années 60 en partie à cause d'autres danses apparues entre temps, plus modernes comme le Disco, le Rock ou le Hip-Hop.

Mais un second souffle va apparaître au milieu des années 70 avec des groupes de Salsa venus de Porto-Rico ou de Colombie. Aux Etats-Unix, plusieurs générations de danseurs (généralement d'origine latine) vont codifier la danse et inventer différents styles.

On distingue alors le style New-York (on2) et le style Los Angeles (on1), tous deux généralement appelé Salsa Portoricaine en Europe, et plus particulièrement en France. Il existe également le style Colombien.

Style New-York (on2)

Style Los Angeles (on1)

Style Colombien


 

Le Casino (ou Salsa Cubaine)

La popularité du Son va beaucoup diminuer à Cuba à cause d'une nouvelle danse émergente : le Casino.

Tout a commencé dans les années 50, quand un groupe de jeunes danseurs de la Havane se réunit aux clubs Casino Deportivo ou Casino Miramar (qui donnera le nom à cette danse) pour y inventer un nouveau style de danse. S'inspirant du Son urbain, elle introduit plusieurs innovations, comme des figures et des acrobaties. L'influence américaine y est très importante, notamment grâce au Rock’n Roll.

Très populaire à Cuba, notamment chez les jeunes, le Casino va reléguer le Son au rang de danse pour personnes âgées.

La Révolution castriste en 1959 va avoir une influence considérable dans la diffusion de ce style de danse en ouvrant les clubs privés à la population et plus particulièrement aux populations les moins favorisées. Le Casino perd alors son statut de danse de privilégiés pour devenir un phénomène de masse. Ce mouvement est amplifié quand des jeunes Havanais participent à des camps de travail agricoles et d'alphabétisation, à l'occasion desquels ils vont diffuser la danse dans tout le pays.

Après un blocus de plusieurs décennies et la chute de l'URSS, Cuba va se réouvrir au monde et on va découvrir à partir des années 1990 un nouveau genre musical venant directement de Cuba : la Timba, évolution du Son, influencée par la musique nord-américaine comme le Jazz, le Rock, la Pop, le Hip-hop, le Reggae ainsi que la Salsa.

Arrive alors une mode internationale de danse de Casino enseignée en Europe par les Cubains émigrés : la « Salsa cubaine ». Ainsi, Cuba va recevoir un flux touristique encouragé par les autorités dans cette période économique de crise aigüe et de pénurie connue sous le nom de « Período especial ». Les autorités et les particuliers vont répondre à cette demande touristique en créant les « casas de musica » et en donnant des cours plus ou moins clandestinement de « Salsa cubaine », c'est-à-dire de Casino modernisé et adapté au goût actuel. Mais ce nouveau style est différent de celui de 1950 et incorpore l'influence afro-cubaine et la Rumba.

Cette danse permet également une version appelée Rueda de Casino où plusieurs couples forment une ronde et effectuent simultanément les mêmes figures. Des changements fréquents de partenaires y sont introduits, rendus possibles par des mouvements de décalage des danseurs ou des danseuses.

Dans les années 60 et 70, la Rueda de Casino connaîtra un essor important à Cuba avec la création de nombreux groupes choréographiques, dont certains, comme la Rueda del Patricio ou la Rueda del Oso, acquièrent rapidement un grand prestige par la virtuosité de leur danse et leur inventivité en matière de figures.

Salsa Cubaine

Rueda de Casino